Nous l’avons vu, la suppression de la différence de traitement existant dans l’ancien article 18, §3,2° de l’AR/C.I.R./1992 a ouvert la boîte de Pandore en faisant apparaître un nouveau risque de discrimination dans l’exercice du recours de dégrèvement d’office prévu par l’article 376 du C.I.R/1992.

En effet, il est enseigné qu’un changement de jurisprudence judiciaire ou administrative n’est pas constitutif d’un « fait nouveau » susceptible d’entraîner un dégrèvement d’office d’une surtaxe sur base de l’article 376 du C.I.R/1992. A l’inverse, il est admis qu’un arrêt de la Cour constitutionnelle, qui déclare une disposition légale inconstitutionnelle en statuant sur une question préjudicielle, n’est pas un changement de jurisprudence et est donc considéré comme un fait nouveau permettant l’introduction d’une demande de dégrèvement.

Cette situation a été mise en lumière par plusieurs juridictions ordinaires qui ont considéré qu’il y avait là une possible différence de traitement en fonction du juge qui a constaté l’inconstitutionnalité de la disposition en cause puisque les conséquences d’un constat d’inconstitutionnalité ne sont pas les mêmes selon que ce constat ait été réalisé par un juge ordinaire ou par un juge constitutionnel.

Une question préjudicielle a alors été posée à la Cour constitutionnelle. Selon la Cour constitutionnelle (26/11/2020), il n’est pas discriminatoire qu’un arrêt par lequel elle reconnaît l’inconstitutionnalité d’une disposition légale en statuant sur une question préjudicielle puisse être considéré comme un « fait nouveau » alors que ce n’est pas le cas lorsqu’une juridiction ordinaire constate qu’une disposition réglementaire est inconstitutionnelle.

La Cour constitutionnelle considère que la différence de traitement entre les décisions d’inconstitutionnalité des juridictions ordinaires et celles de la Cour constitutionnelle est justifiée par le fait que les arrêts de la Cour constitutionnelle ont des effets différents des jugements des juridictions ordinaires. En effet, les arrêts de la Cour constitutionnelle ont une portée générale, qui dépasse le simple litige entre les parties à la cause, alors que les jugements ordinaires n’ont qu’une autorité relative de chose jugée, qui s’applique uniquement aux parties à la cause.

La Cour constitutionnelle ajoute qu’en l’espèce, le fait que l’administration fiscale et le Roi aient par la suite reconnus également l’inconstitutionnalité de l’ancien article 18, §3, 2° de l’AR/C.I.R./1992 ne change rien à ce constat.

Le constat d’inconstitutionnalité de l’ancien article 18, §3, 2° de l’AR/C.I.R./1992 réalisé par les juridictions ordinaires et par l’administration fiscale constitue donc bien un changement de jurisprudence qui n’est pas constitutif d’un fait nouveau susceptible d’entraîner un dégrèvement d’office. Fin du débat.

Pour le Cabinet,

Julien BUY – Avocat fiscaliste